2 - Travailler toutes et tous, en engageant la transition écologique

Le chômage est une machine à faire du profit en broyant des hommes. Les grandes entreprises font plus de profit en délocalisant, en intensifiant le travail, et ne créent plus d'emplois chez nous. Aux 250 000 Bretons classés dans les catégories ABC de pôle emploi* s'ajoutent les temps partiels subis, les emplois aidés, les stages bidon, les CDD, les paysans et les artisans étranglés par le système...

Au nom de l'emploi, les entreprises reçoivent des subventions et aides en tous genres sans contrôle, peuvent donc produire des armes et des pesticides, bétonner le littoral sans que les citoyens aient leur mot à dire, réduisent les droits des salariés (86% de la population active bretonne) , licencient, exploitent, contribuent à multiplier les troubles musculo-squelettiques, les burn-out. Les irradiés de l'Ile Longue ou les contaminés de Triskalia témoignent de la violence des employeurs et du marché de l'emploi.

280 000 emplois publics (INSEE 2011), plus d'un emploi sur 5, sont en péril.

Le rôle des services publics est d'assurer l'accès de tous aux biens et services communs à égalité sur tout le territoire. Leurs agents sont aujourd'hui confrontés à la privatisation et à l'externalisation des tâches, la réduction des effectifs, les « services dégradés », dans le cadre contraignant de protocoles qui définissent des tâches parcellisées et standardisées.

Promu grand créateur d'emplois, le secteur privé est censé embaucher … s'il réalise suffisamment de profit. D'où l'attractivité : tout territoire, mis en concurrence avec les autres doit se rendre attractif pour d'éventuels investisseurs.

La région, avec d'autres partenaires, a développé à grands frais les infrastructures , les centres de compétitivité et les pôles d'excellence, récompensé l'innovation, soutenu les manifestations susceptibles de promouvoir une image dynamique de la région...

Les PME soumises à la loi des grands groupes et des banques, aux marchés publics qui retiennent les plus bas prix, à la concurrence de travailleurs déplacés très bon marché, sont ancrées territorialement et embauchent plus que les grands groupes.

Les grandes firmes font leur marché sur toute la planète pour produire au moindre coût. Elles investissent en Bretagne le temps de se faire de l'argent :l'Italienne ATG a acheté Chaffoteaux, pillé puis fermé l'entreprise. Largement subventionnées, elles externalisent, délocalisent  indifférentes au sort des hommes comme des territoires qui les ont enrichies. Par exemple, l'implantation à Carhaix d'une usine financée par une société chinoise sise dans un paradis fiscal US dépendant d'importations d'intrants d'Amérique et d'exportations de poudre de lait en Chine. Les éleveurs liés par un contrat d'exclusivité sont dépendants des prix fixés très loin.

L'Economie Sociale et Solidaire crée aussi des emplois. Dans un contexte concurrentiel, des coopératives, des mutuelles de santé se soumettent aux lois de la concurrence. Trop d'associations dépendent de subventions et peinent à recruter et payer leurs salariés.

Faire autrement

Nous proposons que nos élus, définissant les politiques publiques avec les intéressés pour permettre de développer une politique sociale et écologique s'engagent sur les priorités suivantes :

  • Répondre aux urgences sociales : appuyer les mesures qui assurent la dignité à chacun , droit réaffirmé dans l'article 1 de la déclaration universelle des droits de l'Homme comme l'augmentation du SMIC et des minimas sociaux indexés sur le SMIC, l'égalité salariale hommes femmes, la gratuité des premières tranches de consommation de l'énergie, des premiers m3 d'eau, des transports de proximité pour les familles en difficultés, l'application du droit au logement

  • Combattre la précarité : un travail utile avec un salaire décent, ce doit être un droit. Le Conseil régional peut favoriser la création d'emplois durables dans les services publics, en démocratisant ses services en refusant toute externalisation ou privatisation rampante, en titularisant les précaires dans ses services.

  • Donner la priorité de l'aide publique ( aides directes et investissements) au soutien des expériences et dynamiques locales : exploitations paysannes bio, AMAP et autres circuits courts et locaux, reprise par les salariés eux-mêmes de leur entreprise menacée, cédée (droit de préemption) ou la création d'entreprise sous forme de SCOP. A Plöermel (56) les salariés organisés en SCOP (les Aciéries de Plöermel) ont racheté leur usine en faillite en 2004, relancé la production et réduit le nombre d'accidents du travail... Soutien aux PME locales , à l'Economie Sociale et Solidaire .

  • Soutenir les luttes des travailleurs contre les dumpings (travailleurs détachés ou produits trop bon marché) et pour le progrès social. Par ses commandes, il peut inclure lors de marchés publics des conditions sociales, écologiques et de proximité y compris en allant jusqu'à la désobéissance civile pour éviter des situations comme la déconstruction du Clémenceau …

  • Intervenir pour un moratoire sur tous les licenciements dans l'agroalimentaire et dans toutes les entreprises menacées actuellement, le gel des avoirs des patrons profiteurs, l'ouverture des livres de compte, la participation des salariés via le CE aux choix de production des entreprises.

La lutte contre la précarité passe par l'amélioration des droits collectifs des salariés et des chômeurs : allocations et droits à la formation et à une reconversion pleine et entière.

Au-delà les salariés doivent être protégés face aux restructurations permanentes des entreprises et face aux reconversions rendues nécessaires pour engager la transition écologique. Cela implique un statut du salarié, une sécurité sociale professionnelle financée par un fond de mutualisation de cotisations impliquant toutes les branches économiques : agroalimentaire, électronique, automobile (déjà largement aidée sans contrepartie par les pouvoirs publics), permettant la continuité des droits et la rémunération des salariés en cas de perte d'emploi.

Un statut de l'étudiant ou du jeune en formation professionnelle doit permettre à ceux qui n'ont pas eu d'emploi de vivre décemment et de se projeter dans l'avenir.

Cette sécurité des droits rendrait possible l’ouverture d’un débat public sur la transformation ou la reconversion de l’économie locale, impliquant salariés, syndicats, comités d’entreprises, agriculteurs, associations écologiques, entreprises : relance de nouvelles productions utiles, garantie et perspectives offertes pour la réorientation des activités, par exemple celles du transport camion.

Écologie et emploi doivent aller de pair, nous proposons :

  • Définir un plan de relance de l'activité écologiquement soutenable pour contribuer à résorber le chômage : à la veille de la COP21 et devant la gravité de la crise écologique (nécessité de réduire de 80% les GES avant 2050) nous devons changer de braquet . La politique régionale s'inscrit dans une politique plus large ; bien des mesures sont possibles au niveau de la région. Leur mise en œuvre nécessite la convergence d'une forte volonté politique des élus, des luttes et de l'intervention citoyenne.

  • Assurer des reconversions :

  • définition avec les représentants des agriculteurs, des salariés, des associations environnementales et les élus d'un plan de réorientation des activités agricoles et de l'agroalimentaire visant la souveraineté alimentaire, une agriculture paysanne bio , le rétablissement de la terre et de son usage comme bien commun, dont l’utilisation implique une planification écologique...

  • reconversion de l’industrie militaire. Des milliers d’emplois sont possibles si le démantèlement des armes nucléaires est engagé de manière unilatérale. Il faut des emplois qualifiés, de bonnes conditions de travail pour y parvenir. De nombreux brevets, d’outils d’assistance, de techniques sont reconvertibles du militaire vers le civil pour la satisfaction des besoins sociaux : en assistance pour la vie des personnes dépendantes, en protection des littoraux, en construction d’une flotte répondant aux exigences écologiques.

  • élaboration d'une véritable alternative au transport routier (avec un plan d’avenir pour les salariés concernés) en développant des possibilités de fret ferroviaire...

  • intégration de la caractéristique maritime dans le développement de la Bretagne : construction, et déconstruction navales, alimentation et énergies marines et conforter les réglementations qui ont permis de réguler l'urbanisme (loi littoral).

  • l'industrie automobile, les chantiers navals, l'informatique...

  • Développer les activités liées à la transition énergétique :

  • développement d'une recherche publique pour favoriser la transition énergétique

  • rénovation thermique des bâtiments et création de logements sociaux de qualité

  • investissement dans les énergies renouvelables. La Bretagne dispose d’un potentiel important (éolien, hydrolien, biomasse) .

  • développement des transports publics en commun, du fret ferroviaire, du cabotage

  • promotion de la sobriété et de l'efficacité énergétique, du traitement et du recyclage des déchets...

  • Relancer l'emploi public pour répondre aux besoins sociaux :

  • de nombreux emplois publics seront nécessaires dans la santé, l'enseignement pour créer de nouveaux services publics de la petite enfance ou de la dépendance.

  • Réduire le temps de travail :

  • l'augmentation de la production par salarié permet de réduire la durée et l'intensification du travail!

  • Mettre enfin la France et la Bretagne en capacité de se doter d'une politique maritime (et industrielle !) : ces dernières décennies, les gouvernements successifs (et le Conseil régional) ont tourné le dos à une authentique « politique maritime » en même temps qu’ils tournaient le dos à une vraie « politique industrielle ». Le « Ministère de la Mer » a été abandonné. Les différents gouvernements ont choisi d’imiter le modèle  économique allemand basé sur le développement de l’industrie à l’export. Ces deux oublis ou renoncements ont des conséquences redoutablement nocives. Ils ont conduit à la soumission de la France et de la Bretagne (maritime et industrielle) à l’Europe néo-libérale destructrice du travail et de l’harmonie des territoires. Les potentialités de développement durable de la Bretagne ultra-marine sont pourtant bien réelles. Les 640.000 kilomètres carrés de la France ne représentent que 0,43% de la surface terrestre du globe, mais elle est une « géante » compte-tenu des territoires émergés et immergés dont elle a la responsabilité reconnue par les instances internationales. La surface de son domaine maritime s'élève à environ 11 millions de kilomètres carrés (elle vient de s’élargir sur la base de nouveaux calculs d’Ifremer). Péninsulaire, la Bretagne est résolument maritime et se classe au premier rang des régions maritimes de France. Ses quatre départements administratifs touchent la Manche ou l’Atlantique. Le Finistère les deux. Le cinquième département historique, la Loire-Atlantique, tutoie l’Atlantique. Selon les critères géo-marins internationaux, la Bretagne possède plus de 2700 km de côtes, soit un bon tiers du littoral français. Elle compte 800 îles et îlots. Certaines îles ont écrit et écrivent de belles pages. Les agglomérations bretonnes ne se situent pas à plus de 80 km de la mer. A peu près 40 % de la population réside dans les communes littorales qui comptent un grand nombre de villes-ports. Une très riche diversité de milieux maritimes et littoraux, Pointe du Raz, baie du Mont Saint-Michel, Golfe du Morbihan, Aber Wrac’h, Ouessant, etc, fait de la Bretagne un « territoire unique et iodé ». Les marées sont source d’une exceptionnelle diversité biologique. Les principaux ports bretons ont tous marqué l’histoire et la culture de la Bretagne rebelle. Les scientifiques le soulignent fortement, « les mers et océans constituent, pour une part essentielle, l’avenir de l’Humanité ». Dans son rapport, daté du 14 octobre 2014, le CESER-Bretagne nous invite de son côté à « changer de regard » sur les différentes économies maritimes. Il évalue à 90 000, le nombre des emplois - maritimes - recensés en Bretagne. Soit, environ 10% du total. Cette évaluation comprend, nous précise-t-il, les 28 000 à 29 000 emplois, « publics » et privés, du secteur Défense dont les deux pôles sont Brest et Lorient. Brest et Lorient vivent des histoires différentes. L’Arsenal, chantier naval a été liquidé, industriellement sinistré, le port de Brest s’occupe principalement des SNLE et un peu des EMR. Avec DCNS, Lorient s’ouvre à l’export des armements. Le CESER souligne le besoin d’une redéfinition de la notion « d’emploi maritime ». En effet, cette notion reste bien vague… Par exemple, dans quel secteur classer « Armor-Lux » qui fait son beurre des « vêtements marines » ? Certes, l'économie maritime concerne historiquement, au premier chef, la pêche, les transports maritimes et le très gros problème des pavillons, marchandises et passagers, l'industrie navale (construction, maintenance, réparation, refonte et déconstruction, civile et militaire), les ports et la sécurité maritime, la protection et l’exploitation des mers et océans, les diverses aquacultures, la plaisance, le tourisme, etc... Nous avons Britanny-Ferries. Nous pouvons proposer la construction d’un véritable service public et poser la question de la propriété et du statut de l’entreprise, de la participation des personnels et des usagers-citoyens à la marche de l'entreprise. L’économie maritime, ce sont les ports, Océanopolis-Brest, les thalassos et thermes, les algues (nutritives, médicales, cosmétiques) , les conserveries, les Énergies Marines Renouvelables, le Rail d'Ouessant, véritable autoroute des mers, les îles, les plages et les côtes, les colonies de vacances, les classes de mer, la culture maritime, les fêtes, le nucléaire militaire et la Base de l’Ile longue dont il faut penser la reconversion, les activités sportives maritimes et les centres nautiques qui accueillent les écoles, les établissements scolaires, universitaires et les « grandes » écoles, la recherche ( 2000 chercheurs à Brest, l'avenir d’Ifremer est posé). L’économie maritime, c’est aussi la pose des câbles sous-marins (dit trop sommairement, le téléphone, internet)…. Et ce n’est que le commencement…. La Bretagne attire sur son littoral non seulement les touristes en grand nombre mais aussi les bretons. La population résidente s’accroît régulièrement et représente en 2003 près de 50% de la population bretonne. Réceptacle ultime de toutes les pollutions, le milieu maritime est particulièrement mis à rude épreuve pour remplir correctement ses fonctions environnementales. Ainsi, bien que la qualité des eaux de baignade soit en constante amélioration, les algues vertes ont touché plus de 100 communes en 2002, avec pour accusé principal le nitrate provenant des rivières. En plus du phénomène d’eutrophisation ces «marées vertes» ont un impact non négligeable sur l’image de la région et l’économie du littoral. On observe également la présence d’algues toxiques qui peut entraîner l’interdiction de collecte de coquillages et la fermeture de zones conchylicoles. 

  • Quelques propositions concrètes :

          Redonner de l'attractivité à nos ports :

  • en préemptant des espaces fonciers pour l'installation de PMI liées à la maintenance des flottilles de pêche et de plaisance

  • favoriser toute création par la location-vente de terrains et la création d'ateliers-relais mutualisant les services communs aux PMI

  • création d'un service économique en charge de la mobilisation des fonds publics, solidaires, assurances, européens...

  • création d'un fonds d’investissement pour l'emploi et la formation doté au minimum d'un million d'euros (avance remboursable)

  • moderniser l'environnement portuaire afin de réceptionner flottilles pêche et plaisance, fret maritime

  • relocaliser les chantiers navals comme PIRIOU, au moins certaines activités créatrices d'emplois productifs en interdisant la délégation d'ouvriers payés aux conditions de leur pays d'origine (lituaniens, polonais etc..)

  • développer toute activité de maintenance et de retrofit (anciens gréements) (retrofit = échange de pièces usées et de composants d’équipements obsolètes tout en maintenant la configuration des équipements et de l’unité de production d’origine )

  • développer les espaces dédiés aux professionnels de la plaisance (ponton, levage,carénage...)

  • développer le fret maritime aux dépends du tout camion (liaisons Espagne, Grande Bretagne, Le Havre (Paris), Bordeaux ), favoriser le regroupement en SCOP de la pêche côtière avec circuits directs consommateurs et commerce de proximité

​Mettre fin au chômage, à la précarité, nécessite de posséder les leviers de l'économie, de ne plus les laisser dans les mains d'une petite minorité d'exploiteurs et donc pour les travailleurs de s'approprier leurs outils de production. L'action des élus devra s'inscrire dans cette visée, en favorisant tous les processus de réappropriation de leur outil de travail et d'extension des droits des salariés en matière de choix de production. Cela passe aussi par la création d'un outil financier public régional pour l'investissement.

Ajouter un commentaire

Anti-spam