Pour
les communistes, les municipales et cantonales ne sont certes pas
catastrophiques, mais ils ne parviennent pas à enrayer leur récession
électorale.
Soulagement
et satisfaction sont les deux sentiments affichés place du
Colonel-Fabien après les élections municipales et cantonales. Après
deux terribles reculs aux élections présidentielles de 2002 (3,3 %) et
2007 (1,9 %), le PCF craignait de disparaître d’un grand nombre de
villes et de départements. Le 9 mars, au soir du premier tour, les
responsables communistes pouvaient au contraire se féliciter de la
reconduction de leurs équipes municipales dans 57 villes de plus de 9
000 habitants et de la reconquête de Dieppe et de Vierzon ; ainsi que
d’un score national maintenu de 8,85 % aux élections cantonales. Une
semaine plus tard, à l’heure d’un bilan global, Marie-George Buffet et
ses proches mettaient encore en avant les bons résultats d’ensemble des
communistes : « C’est bien le rouge qui arrive très nettement en troisième position », sur la carte de France des villes et des départements, s’est réjouie la numéro un communiste, lors d’une conférence de presse.
Jacky Hénin, maire communiste sortant de Calais, assiste au dépouillement du second tour. LO PRESTI/AFP
Devant le conseil national, qui se réunit les 29 et 30 mars, la direction du PCF devrait redire que « ces élections sont un bon cru ». Et rappeler les « gains »du parti à l’issue du scrutin : deux conseils généraux communistes, le
Val-de-Marne et l’Allier, 28 villes de plus de 30 000 habitants, 91 de
plus de 9 000 habitants, contre 86 en 2001, le cap des 13 000 élus
largement dépassé... Comme dit Marie-George Buffet, « tout cela existe ».
Seule concession faite par la secrétaire nationale communiste, qui
escompte bien s’appuyer sur ce bilan pour maintenir sa ligne au congrès
de fin 2008 : l’objectif de 100 mairies de plus de 9 000 habitants
qu’elle s’était assigné au lendemain du premier tour n’est pas tout à
fait atteint.
Ce bilan trop flatteur pour être honnête est toutefois
loin de faire l’unanimité parmi les communistes. Certes, le PCF
conserve nombre de ses cités, mais ce résultat honorable est terni par
la perte du département de Seine-Saint-Denis et des villes
d’Aubervilliers, Calais ou Montreuil. Le premier tour glorieux a été
suivi d’un second nettement plus mitigé. Si l’on fait abstraction de
toute habileté dans la présentation des résultats, le PCF gère
aujourd’hui 27 villes de plus de 30 000 habitants contre 29 en 2001 et
39 en 1989 ; 7 villes entre 20 000 et 30 000 habitants contre 9 en
2001 ; 42 villes de 10 000 à 20 000 habitants contre 46 en 2001 ; 100
communes de 3 500 à 10 000 habitants contre 105 en 2001. Ce décompte
précis, effectué par Roger Martelli, révèle aussi qu’avec 118
conseillers généraux élus ou réélus, le PCF a perdu 10sièges par
rapport à 2001. Ce refondateur voit aussi dans la baisse du nombre de
candidatures de son parti aux cantonales (1 639 en 2001, 1 163 en 2008)
le symptôme d’un « délitement de la couverture nationale des communistes et un resserrement sur leurs zones de force ».
« Une élection ne chasse pas l’autre ; un certain tassement du recul n’implique pas la fin de la récession électorale », assure Roger Martelli. En historien, il note qu’« en tendance longue le PCF n’a pas interrompu le long trend électoral du déclin ».
Autre phénomène observé sur la durée : alors que dans les années
1950-1960 le PCF disposait d’une très forte implantation nationale et
d’une représentation territoriale restreinte, l’union de la gauche lui
a permis d’avoir une forte implantation locale qui, après avoir culminé
en 1977, résiste mieux que son audience nationale.
Ce long mouvement de dénationalisation du vote
communiste préoccupe Roger Martelli. Mais aussi Pierre Zarka, qui
craint que son parti ne soit atteint du « syndrome du PRG, qui a une palanquée d’élus locaux mais sans pour autant avoir un projet et une existence nationale ». Ce qui le rend incapable d’enrayer le renforcement du bipartisme et de plus en plus dépendant du PS pour avoir des élus.
Un changement de ligne est donc nécessaire. Mais lequel ? Les « communistes unitaires » pointent cette « situation de faiblesse et de dépendance croissante » de leur parti par rapport à ses partenaires socialistes, pour en déduire « la nécessité de réenclencher une dynamique de convergence des citoyens et des forces de transformation sociale ». Sur l’autre aile du spectre politique interne au PCF, André Gérin pointe « une stratégie d’échec »,
et demande que la direction nationale rende son mandat. Le député maire
de Vénissieux, opposant déclaré depuis plusieurs congrès et chef de
file des orthodoxes, s’est porté candidat à la direction du PCF, lundi.
Il annonce son intention d’entreprendre un tour de France « pour aller à la rencontre des classes laborieuses et populaires », et opérer un retour aux sources.
D’ici à quelques mois, le PCF devra choisir entre trois
stratégies : un rapprochement avec le PS au risque d’une satellisation
accrue ; un repli identitaire au risque de ne plus peser
nationalement ; une construction de convergences avec des forces
antilibérales dispersées. Chacune a sa lecture de la séquence
électorale qui vient de s’achever.
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