
Quelque sept cents personnes ont participé, samedi à Gennevilliers (Hauts-de-Seine), à la réunion nationale des signataires de l’Appel de l’hebdomadaire Politis, « l’Alternative à gauche, organisons-la ! ».
Au terme d’un débat qui a principalement porté sur les réponses antilibérales à la crise économique, sociale et écologique actuelle, les participants ont décidé de créer « un cadre permanent de réflexion et d’action » qui pourrait avoir pour premier objectif l’organisation d’assises pour le changement au début de 2009. Ils ont souligné « la nécessité d’une nouvelle force politique » de transformation sociale et écologique, pour une « gauche digne de ce nom », à la fois unitaire et respectueuse de la diversité. Ils ont estimé qu’aucune force ne pouvait prétendre répondre à elle seule à cette attente.
La réunion des signataires a décidé d’ouvrir un certain nombre de « chantiers » répondant aux urgences économiques et sociales, écologiques, démocratiques, européennes, et de paix dans le monde. Ils ont constitué un Bureau d’animation composé d’une vingtaine de représentants les régions ainsi que des courants politiques et associatifs parties prenantes de l’Appel lancé par Politis le 14 mai dernier.
Ce bureau sera chargé de gérer la suite du processus engagé. Il a également reçu mandat pour s’adresser à toutes les forces antilibérales, « celles-là mêmes qui avaient mené la bataille victorieuse du référendum du 29 mai 2005 », afin qu’elles s’expriment « en commun » à l’occasion des prochaines élections européennes de juin 2009.
Parmi les courants et les personnalités signataires de l’Appel de Politis figurent notamment, au côté de nombreux intellectuels, des responsables communistes, le courant des Communistes unitaires, la gauche des Verts, autour de Martine Billard et de Francine Bavay, le mouvement Les Alternatifs, les Collectifs antilibéraux, Mars, le courant unitaire de la LCR, le député socialiste Marc Dolez et le courant du PS Utopia. Invité en tant qu’observateur, le sénateur socialiste Jean-Luc Mélenchon a pris la parole. Marie-George Buffet, secrétaire national du PCF, a adressé un message à Politis, et la LCR a dépêché un observateur.
L'Appel
Nous célébrons l’anniversaire de Mai 68.
Le temps n’est toutefois ni aux commémorations, ni à la nostalgie.
La planète s’est profondément transformée. Le capitalisme se fait toujours plus prédateur. Les émeutes de la faim sont le corollaire de l’enrichissement indécent d’une minorité de privilégiés. Les crises financières s’enchaînent et une catastrophe écologique se dessine. Bousculée par un nouveau totalitarisme de marché, la démocratie s’étiole.
C’est à la refondation d’une politique d’émancipation qu’il importe de s’atteler.
En France, le sarkozysme se heurte déjà à la résistance du pays. Dans les entreprises du secteur privé, dans les services publics, à l’école, d’amples mobilisations se font jour.
À quarante ans de distance, deux questions se reposent à nous : quelles perspectives offrir à la colère sociale ? Comment la volonté de changer radicalement l’ordre des choses peut-elle redonner majoritairement le ton à gauche ?
À cet égard, chacun hélas peut le constater, il manque toujours une force incarnant un projet alternatif.
Du côté de la majorité dirigeante du Parti socialiste, les volontés hégémoniques se confirment, et avec elles les tendances au renoncement social-libéral, inspirées des exemples de MM. Blair ou Prodi. Mais la gauche de transformation sociale et écologiste ne doit pas, elle, s’accommoder d’un statu quo qui lui interdit d’espérer changer en profondeur la donne politique.
La menace du bipartisme devient plus forte, avec son choix mortifère ramené à deux variantes de l’adaptation au libéralisme. Tout cela peut nous conduire à des désastres comme celui que vient de connaître la gauche italienne, incapable d’empêcher le retour de Berlusconi aux affaires et littéralement disloquée.
Les municipales et les cantonales viennent pourtant de prouver qu’il existe ici un espace comparable à celui révélé par Die Linke en Allemagne ou d’autres expériences similaires en Europe. Faute de convergence entre des traditions et des cultures jusqu’ici séparées, faute de prendre en compte l’apport des mouvements sociaux et citoyens ayant émergé depuis plusieurs années, le champ des possibles demeurera inévitablement limité : aucune force constituée ne peut rassembler autour d’elle seule.
Les échecs passés nous instruisent des difficultés de l’entreprise. Nous n’en restons pas moins convaincus que c’est le seul horizon porteur d’avenir.
Un cadre permanent pour faire front
Nous en appelons donc à l’affirmation d’une gauche enfin à gauche. Qui n’oublie plus la nécessité de redistribuer les richesses. Qui soit en phase avec les aspirations des salariés, avec ou sans papiers, des quartiers populaires, des jeunes. Qui conjugue urgence sociale, urgence démocratique et urgence écologique. Qui permette au peuple d’exercer sa souveraineté dans tous les domaines. Qui place l’égalité entre hommes et femmes au cœur de son projet. Qui milite pour un nouveau mode de production et de consommation, soutenable et respectueux des équilibres écologiques. Qui promeuve la construction d’une autre Europe et des rapports de codéveloppement avec le Sud. Qui devienne, ce faisant, une véritable force.
Militants politiques, acteurs du mouvement social et culturel, nous pouvons dès à présent agir de façon coordonnée. Sans préalable sur les engagements des uns et des autres, construisons un cadre permanent qui nous permette, ensemble, nationalement et localement, de réfléchir aux moyens d’une vraie réponse politique aux attaques de la droite et du Medef et d’aborder les grands rendez-vous qui s’annoncent. D’ici l’été, que chacun et chacune se saisisse de cette proposition sur le terrain. Et retrouvons-nous à l’occasion d’un grand rendez-vous national en septembre, afin de prolonger ces échanges.
Premiers signataires :
Paul Ariès, Ariane Ascaride, François Asensi, Clémentine Autain, Christophe Barbillat, Francine Bavay, Hamida Bensadia, Pierre Bergougnoux, Jacques Bidet, Martine Billard, Jean-Jacques Boislaroussie, Patrick Braouezec, Bernard Calabuig, Yves Contassot, Eric Coquerel, Emmanuelle Cosse, Thomas Coutrot, Claude Debons, Bernard Defaix, Marc Dolez, Annie Ernaux, Jean-Claude Gayssot, Jacques Généreux, Susan George, Dominique Grador, Robert Guediguian, Michel Husson, Raoul-Marc Jennar, François Labroille, Frédéric Lebaron, Jacques Lerichomme, Philippe Mangeot, Roger Martelli, François Maspero, Gérard Mauger, Marion Mazauric, Daniel Mermet, Mohammed Mechmache, Philippe Meyrieu, Claude Michel, Yann Moulier-Boutang, Dominique Noguères, Michel Onfray, Christian Picquet, Christophe Ramaux, Yves Salesse, Denis Sieffert, Patrick Silberstein, Evelyne Sire-Marin, Emmanuel Terray, Rémy Toulouse, Marcel Trillat, Christophe Ventura, Marie-Pierre Vieu, Claire Villiers.
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